Le BREXIT et certaines de ses conséquences négatives sur les affaires de droit de la famille franco-britannique.

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Brexit : c’était quand ?

Le Royaume-Uni a voté en faveur du Brexit en juin 2016 (51,9 % pour le Brexit et 48,1 % pour le maintien). En mars 2019, le Royaume-Uni a invoqué l’article 50 du traité UE et la date de sortie a été fixée au 31 janvier 2020. Nous avons eu la chance de bénéficier d’une période de transition entre le 31 janvier 2020 et le 31st décembre 2020 afin que nous puissions continuer à utiliser tous les règlements européens pendant une année supplémentaire.

Situation actuelle

Depuis le 1ᵉʳst janvier 2021, nous appliquons le droit français ou nous appliquons le droit anglais et c’est un cauchemar pour les clients car les procédures sont plus complexes et plus coûteuses. Prenons quelques exemples concrets : la question de la compétence, la question de la reconnaissance des divorces anglais en France et l’exécution des décisions anglaises relatives aux enfants en France.

Question de compétence

Depuis le 1ᵉʳst janvier 2021, il n’y a plus de “course à la compétence” stricto sensu car les règles de litispendance ne peuvent être opposées au juge anglais. Prenons l’exemple d’une famille française vivant en Angleterre. Le mari français dépose une demande de divorce en France sur la base de la nationalité commune des époux, conformément au règlement BII ter. Il agit le premier dans les délais. Le juge français entendra l’affaire et confirmera qu’il est compétent. Quelques semaines plus tard, l’épouse française dépose une demande de divorce en Angleterre sur la base de la résidence habituelle des époux, conformément à l’article 5(2) du Domicile and Matrimonial Proceedings Act 1973 (loi sur le domicile et les procédures matrimoniales). Le mari français ne peut pas soumettre au tribunal anglais qu’il doit rejeter l’affaire parce qu’elle a été saisie en second lieu. Non, cela n’est plus possible. Depuis le Brexit, les tribunaux anglais ont rafraîchi un vieux principe qui est “forum conveniens“. Même si le tribunal anglais est saisi en second lieu, il peut décider d’entendre et de statuer sur l’affaire s’il décide que l’Angleterre est le forum le plus approprié parce que la famille y vit, parce que les revenus sont en Angleterre, parce que les enfants vont à l’école en Angleterre… Il s’agit d’un exercice discrétionnaire pour le juge anglais.

La conclusion est que les frais de justice après le Brexit ont énormément augmenté, car certains clients se verront conseiller de traiter des affaires dans deux pays et de demander une audience de juridiction qui est très coûteuse.En Angleterre, l’audience de juridiction sera inscrite pour au moins une journée entière.

Reconnaissance des décisions de divorce anglaises en France

Nous savons qu’il est obligatoire d’enregistrer votre divorce anglais en France si vous êtes un ressortissant français et nous avons déjà écrit sur ce sujet. Avant le Brexit, la procédure était assez simple. Nous remplissions le certificat européen art 39 (ou D180) et l’envoyions au tribunal de Bury St Edmunds pour qu’il soit scellé. Avec le certificat scellé et une traduction certifiée de l’ordonnance finale, nous demandions à la mairie française de la célébration du mariage d’enregistrer le divorce et d’insérer une mention sur l’acte de mariage ainsi que sur l’acte de naissance.

Depuis le Brexit, la procédure est plus complexe et s’éternise ! Il faut maintenant une traduction certifiée de la demande de divorce, du divorce conditionnel et aussi du divorce définitif. Il faut déposer une requête devant le Procureur français du Tribunal rattaché à la ville de célébration du mariage pour relater où chaque époux résidait habituellement au moment du dépôt de la demande de divorce et motiver la demande de reconnaissance de l’ordonnance en France. À l’heure actuelle, la procédure dure près d’un an à Paris et à Nantes. Cela signifie que les ressortissants français ne peuvent pas se remarier si leur divorce n’a pas été enregistré au préalable.

Exécution des décisions anglaises en France

Il était très facile d’aider les clients lorsqu’ils avaient, par exemple, une ordonnance de tutelle spéciale en Angleterre. Le juge anglais apposait parfois des scellés sur le certificat européen à la fin de l’audience. Nous avions l’habitude de déposer une demande de reconnaissance en France avec une traduction certifiée de l’ordonnance anglaise ainsi que le certificat européen. La procédure était unilatérale et une nouvelle décision française était obtenue en quelques semaines ou quelques mois.

Depuis le Brexit, nous utilisons la convention de La Haye du 19 octobre 1996 sur la reconnaissance et la loi applicable. La procédure est plus longue. Il n’est pas possible d’exécuter immédiatement une décision anglaise en France. La convention de La Haye ne prévoit pas de certificat à remplir par le tribunal anglais et il arrive souvent que le tribunal français inscrive la demande de reconnaissance comme procédure d’exequatur.

Le Brexit a complexifié nos procédures dans les tribunaux de la famille, ce qui est dommageable pour les clients.